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SOUS LE SOLEIL DE SATAN

ses livres, et dont il croyait avoir épuisé la douceur, la mort, — d’ailleurs partout visible à travers sa froide ironie, comme un visage sous une eau claire et profonde, — cent fois rêvée, savourée, il ne la reconnut plus. Il la voyait désormais de trop près, bouche à bouche. Il avait choisi l’image d’une lente vieillesse, à la pente douce et fleurie, et qui s’endort contente, au dernier pas. Mais il n’attendait point cette surprise en plein jour, cette effraction… Hé quoi ? déjà ?

Il s’efforce d’en chasser la pensée, de la déguiser au moins ; il dépense à ce jeu misérable des ressources infinies. À peine ose-t-il confier aux plus intimes quelque chose de son angoisse, et ils ne l’entendent qu’à demi ; nul ne veut voir, dans les yeux du grand homme, le regard tragique où s’exprime une terreur d’enfant. Au secours ! dit le regard. Et l’auditoire s’écrie : Quel merveilleux causeur !