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SOUS LE SOLEIL DE SATAN

n’ambitionnât d’entendre à son lit funèbre quelqu’une de ces paroles consolantes, pimentées, mezzo voce, d’une plaisanterie de cannibale. Car le muscadin ne fait plus le compte de ceux qui, par ses soins — et pour imiter son langage — trépassèrent à la rigolade.

— Mon Dieu ! c’est bien possible, l’abbé, répondit-il d’un ton conciliant.

Appelé en grande hâte et sur le conseil de M. le curé de Luzarnes, il avait trouvé la maîtresse du Plouy en pleine crise de délire, à laquelle l’épuisement seul mit fin. Mais, vers le soir, et la malade endormie :

— Mon cher docteur, s’était-il écrié, j’ai à vous demander comme un service personnel : Votre automobile, dites-vous, doit vous reprendre ici vers sept heures ? Il en est cinq à peine. Accompagnez-moi tout doucement jusqu’à Lumbres. Une fois là-bas, qui vous empêche de téléphoner à votre mécanicien de Chavranches, qui viendra vous y chercher ? Entre temps, vous aurez examiné sérieusement mon pauvre confrère, et je connaîtrai votre avis.

— Vous le connaissez depuis longtemps ! dit le jeune praticien, non sans gaieté. Une nourriture peu substantielle, pas d’exercice, le