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LA TENTATION DU DÉSESPOIR

grandissante. Tout à coup, ce regard tomba sur la large échancrure de la soutane et les linges ensanglantés. Alors, l’abbé Donissan, se rejetant vivement en arrière, cacha sa figure dans ses mains.

Déjà celles de l’abbé Menou-Segrais les écartait doucement, découvrant la rude tête, d’un geste presque maternel.

— Mon petit, Notre-Seigneur n’est pas mécontent de vous, fit-il à voix basse, avec un indéfinissable accent.

Mais reprenant aussitôt ce ton habituel de bienveillance un peu hautaine dont il aimait à déguiser sa tendresse :

— Vous jetterez demain au feu cette infernale machine, l’abbé ; il faut trouver quelque chose de mieux. Dieu me garde de parler seulement le langage du bon sens : en bien comme en mal il convient d’être un peu fou. Je fais ce reproche à vos mortifications d’être indiscrètes : un jeune prêtre irréprochable doit avoir du linge blanc.

… Levez-vous, dit encore l’étrange vieil homme, et approchez-vous un peu. Notre conversation n’est pas finie, mais le plus difficile est fait… Allons ! Allons ! asseyez-vous là. Je ne vous lâche pas.

Il l’installait dans son propre fauteuil et,