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c’est d’un monde formé par l’Évangile que vous laissez chasser le pauvre.

Je ne vous juge pas. Je me juge avec vous. Je ne refuse pas le châtiment commun. Nous avons tous livré le Fils de l’Homme. Du moins, j’espère ne pas l’avoir vendu. La part de vérité dont je dispose, je ne l’ai jamais refusée à personne. J’ai répondu en face à qui me la demandait. J’ai répondu dans un langage d’homme et non par des phrases honteuses qui renvoient dos à dos, avec une douceur exécrable, le juste et l’injuste, le riche et le pauvre, la victime et le bourreau. S’il plaît à Dieu, les menteurs ne me tiendront pas, ils ne m’ont jamais tenu. Je me moque des menteurs parce que je les mets bien au défi de rien posséder en ce monde que je puisse désirer moi-même. Et par mon exil volontaire, je n’ai pas seulement souhaité leur échapper, j’ai voulu échapper jusqu’au soupçon de leur appartenir en quoi que ce soit. Ceux qui m’aiment savent où me trouver par la pensée, dans quelque coin perdu de la campagne brésilienne, parmi les vaches et les cochons. Ils ne seront ainsi jamais tentés de