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L’IMPOSTURE

infiniment mieux…, protesta le moribond. Les mois d’été sont les meilleurs. Dès l’automne, vous me verrez partir pour la Corse, chez le comte Sapène, qui m’honore de son amitié. J’aurai à faire le printemps prochain. Les élections seront à gauche : il s’agit, dès à présent, de manœuvrer avec une prudence extrême. Nous touchons au but. Les socialistes sont extrêmement bien disposés. Le discours de M. de Reversot, au dernier congrès des Jeunesses, a eu les résultats les plus heureux. Ce sera la consolation de ma vie d’en avoir, sinon dicté les termes, du moins inspiré les meilleures formules, celles qui s’ouvrent sur un magnifique avenir, annoncent un renversement prochain des partis et des alliances qui sera la grande révolution des temps nouveaux.

— Reposez-vous, supplia Mme Jérôme, presque tendre.

Jamais, en effet, M. Catani n’avait parlé si longtemps, et ce bavardage fébrile, haletant, marquait plus qu’aucun autre symptôme sa faiblesse et son angoisse.

— Le grand tort de certains d’entre nous (en petit nombre) est de laisser intervenir, dans ces discussions délicates… (ici sa voix trembla) de… de ces imprudents qui… pareils à celui que vous entendiez tout à l’heure… (depuis plusieurs mois il m’a, hélas ! si cruellement déçu !) ont… ont tendance… une certaine tendance à se hâter, à bouleverser… Ce n’est que trop vrai ! Ah ! oui, ce n’est que trop vrai… J’aime la jeunesse, et celui-ci n’est pas le premier qui m’ait fait commettre des sottises… des folies… de véritables folies !… J’ai mis tant d’obstination… d’entêtement même !… à