Mgr Espelette. Ne parlons pas de ce qui divise, ne portons intérêt qu’à ce qui nous unit. Gloire aux hommes de bonne volonté ! J’ai été passionnément démocrate dès ma jeunesse, en un temps où il y avait encore quelque péril à l’avouer ; aucune réforme sociale ne me fait peur, et je crois néanmoins n’avoir jamais cessé d’être, selon mes forces et mes lumières, un prêtre irréprochable… Il est si simple et si doux de vivre en paix avec les hommes ! Et que faut-il ? Croire à la sincérité de tous, inébranlablement. Sans doute on s’expose ainsi à souffrir de quelques déceptions inévitables, mais le nombre en est bien petit ! J’arrive à la fin de ma carrière, du moins de ma carrière active. Eh bien ! je dois ce témoignage à mes semblables : j’ai connu très peu d’insincères.
Il baissa un moment les paupières pour mieux entendre le discret frémissement de sympathie qui fait chaque fois chanceler son cœur, et les yeux mouillés de vraies larmes :
– Mon cher monsieur Jérôme, ne prenez donc pas au sérieux un mouvement de révolte involontaire. Je sais quel sens exact, concret, le terme de chauvinisme peut avoir dans votre vocabulaire de technicien, que vous l’utilisez objectivement, sans haine ni mépris. Au sens élevé, humanitaire, universel du mot, vous n’êtes pas moins bon patriote que moi-même. Je vous fais néanmoins cet aveu, pour n’y plus revenir ; l’excellent abbé Hochegourde m’effraye un peu.
M. Jérôme, furieux d’avoir été interrompu, fit un geste vague et courtois, tandis que le comte Lavoine de Duras et M. Catani prenaient ensemble la parole. Mais le chevrotement de l’ancien préfet fut d’ail-