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JOURNAL

mon mal, mon affreux mal, qui n’avait jamais été plus pressant. Mon Dieu, la douleur serait encore supportable mais l’espèce de nausée qui l’accompagne maintenant abat tout à fait mon courage. Nous étions sur le seuil de la porte. — « Tu es dans la peine, m’a-t-il répondu. C’est à toi de me bénir. » Et il a pris ma main dans la sienne, il l’a levée rapidement jusqu’à son front, et il est parti. C’est vrai qu’il commençait à venter dur, mais pour la première fois, je ne l’ai pas vu redresser sa haute taille, il marchait tout courbé.

Après le départ de M. le curé, je me suis assis un moment dans ma cuisine, je ne voulais pas trop réfléchir. Si ce qui m’arrive, songeais-je, prend tant d’importance à mes yeux, c’est parce que je me crois innocent. Il y a certainement beaucoup de prêtres capables de grandes imprudences, et on ne m’accuse pas d’autre chose. Il est très possible que l’émotion ait hâté la mort de Mme la comtesse, l’erreur de M. le curé de Torcy ne porte que sur le vrai caractère de notre entretien. Si extraordinaire que cela paraisse, une telle pensée m’a été un soulagement. Alors que je déplore sans cesse mon insuffisance, vais-je tant hésiter à me ranger parmi les prêtres médiocres ? Mes premiers succès d’écolier ont été trop doux sans doute au cœur du petit malheureux que j’étais alors, et le souvenir m’en est resté, malgré tout. Je ne supporte pas bien l’idée qu’après avoir été un élève « brillant » — trop brillant ! — je doive aujourd’hui m’asseoir au haut des gra-