Page:Berlioz - Mémoires, 1870.djvu/351

Cette page n’a pas encore été corrigée
  • Un chœur de Charles VI (Halévy),
  • Le chœur de la bénédiction des poignards, des Huguenots (Meyerbeer),
  • La scène du jardin des plaisirs d’Armide (Gluck),
  • L’apothéose de ma Symphonie funèbre et triomphale.

Nous devions faire la répétition générale dans le bâtiment de l’Exposition, dont j’avais choisi pour le concert, le grand carré central nommé salle des machines. La veille même de cette importante épreuve, pendant que les charpentiers travaillaient à la construction de mon estrade, la salle n’était pas encore libre. Un grand nombre de machines en fer encombraient l’emplacement destiné au public. On n’avait pas même pris les mesures nécessaires à l’enlèvement de ce monstrueux attirail.

Je n’essayerai pas de décrire mon anxiété à cet aspect.

Les murs de Paris étaient couverts d’affiches annonçant le festival ; j’étais engagé pour une somme considérable, et je me voyais arrêté dans mon entreprise par l’obstacle le plus insurmontable et le plus imprévu ! Nous ne pouvions retarder le concert d’un seul jour, l’ordre de démolir l’édifice, au plus tard le 5 août, était déjà donné, et les propriétaires des matériaux entrant dans sa construction ayant le droit de commencer sa démolition le 1er août, jour du premier concert, ne consentaient qu’à force d’argent à le laisser subsister quelques heures de plus. Ils étaient les vrais maîtres du local et nous prouvaient d’une façon péremptoire que le ministre du commerce nous avait prêté ce qui ne lui appartenait plus. J’eus un instant de vertige et je m’élançai à la course pour aller faire placarder une affiche contremandant le festival. Strauss m’arrêta presque de force, en m’assurant que le lendemain cinquante voitures viendraient déblayer le terrain. Comme je me voyais perdu de toutes manières, je laissai les choses suivre leur cours. Le lendemain, mes mille artistes se rendirent à la répétition générale, qui se fit au milieu des cris des charretiers, des claquements de leurs fouets et des hennissements de leurs chevaux. Mais enfin, les charretiers y étaient, les chevaux peu à peu emportaient les machines, le terrain devenait libre et je sentais l’oppression de ma poitrine diminuer. Après la répétition, autre cauchemar. Les auditeurs nombreux qui y avaient assisté s’approchent de moi déclarant, à l’unanimité, que l’estrade est à refaire et que, par suite de la position du chœur placé au-devant de l’orchestre, il est impossible d’entendre un son des instruments. Se figure-t-on un orchestre de cinq cents instrumentistes qu’on n’entend pas ! Aussitôt soixante ouvriers se mettent à l’œuvre et coupant en deux l’estrade, dont le plan n’était pas de moitié assez incliné, baissent de trois mètres la partie antérieure réservée au chœur, et démasquent ainsi l’orchestre dont ils élèvent encore, d’ailleurs, les derniers gradins. Cette nouvelle disposition devait nécessairement permettre d’entendre les instruments, malgré le peu de sonorité du local, défaut irrémédiable et qu’on ne