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jouant à peu près sept fois par mois, figure en conséquence dans quatre-vingt-quatre représentations par an, et touche un peu plus de 1,100 francs par soirée. Maintenant, en supposant un rôle composé de onze cents notes ou syllabes, ce sera 1 fr. par syllabe.

Ainsi, dans Guillaume Tell :

Ma (1 fr.) présence (3 fr.) pour vous est peut-être un outrage (9 fr.). Mathilde (3 fr.), mes pas indiscrets (cent sous) Ont osé jusqu’à vous se frayer un passage (13 fr.) !

Total, 34 francs. — Vous parlez d’or, monseigneur !

Étant donnée une prima donna aux misérables appointements de 40,000 francs, la réponse de Mathilde revient nécessairement à meilleur compte (style du commerce), chacune de ses syllabes n’allant que dans les prix de huit sous ; mais c’est encore assez joli.

On pardonne aisément (2 fr. 40 c.) des torts (16 s.) que l’on partage (2 fr.). Arnold (16 s.), je (8 s.) vous attendais (32 s.)

Total, 8 francs.

Puis il paye, il paye encore, il paye toujours ; il paye tant, qu’un beau jour il ne paye plus, et se voit forcé de fermer son théâtre. Comme ses confrères ne sont pas dans une situation beaucoup plus florissante, quelques-uns des immortels doivent alors se résigner à donner des leçons de solfége (ceux qui le savent), ou à chanter sur des places publiques avec une guitare, quatre bouts de chandelle et un tapis vert. LE SOLEIL SE COUCHE

ciel orageux

Le ténor s’en va ; sa voix ne peut plus ni monter ni descendre. Il doit décapiter toutes les phrases et ne chanter que dans