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sang et de carnage que la guerre vient de mettre sous ses yeux, succombent accablés sous le poids du plus désolant contraste. Son père est mort ; la chaumière est déserte ; tout est calme et silencieux ; c’est la paix, c’est la tombe. Et le sein sur lequel il lui serait si doux, en un pareil moment, de répandre les pleurs de la piété filiale, ce cœur auprès duquel seul le sien pourrait battre avec moins de douleur, l’infini l’en sépare..... Elle ne sera jamais à lui..... La situation est poignante et dignement rendue par le compositeur. Ici, le chanteur s’élève à une hauteur à laquelle on ne l’eût jamais cru capable d’atteindre ; il est sublime. Alors, de deux mille poitrines haletantes s’élance une de ces acclamations que l’artiste entend deux ou trois fois dans sa vie, et qui suffisent à payer de longs et rudes travaux.

Puis les bouquets, les couronnes, les rappels ; et le surlendemain, la presse débordant d’enthousiasme et lançant le nom du radieux ténor aux échos de tous les points du globe où la civilisation a pénétré.

C’est alors, si j’étais moraliste, qu’il me prendrait fantaisie d’adresser au triomphateur une homélie, dans le genre du discours que fit don Quichotte à Sancho, au moment où le digne écuyer allait prendre possession de son gouvernement de Barataria :

« Vous voilà parvenu, lui dirais-je. Dans quelques semaines vous serez célèbre ; vous aurez de forts applaudissements et d’interminables appointements. Les auteurs vous courtiseront, les directeurs ne vous feront plus attendre dans leur antichambre, et si vous leur écrivez, ils vous répondront. Des femmes, que vous ne connaissez pas, parleront de vous comme d’un protégé ou d’un ami intime. On vous dédiera des livres en prose et en vers. Au lieu de cent sous, vous serez obligé de donner cent francs à votre portier le jour de l’an. On vous dispensera du service de la garde nationale. Vous aurez des congés de temps en temps, pendant lesquels les villes de province s’arracheront vos représentations. On couvrira vos pieds de fleurs et de sonnets. Vous chanterez aux soirées du préfet, et la femme du maire vous