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traduction, destinée à ceux qui bornent leurs prétentions à comprendre la langue française.

L’honneur me pique pour me faire avancer. Oui, mais quoi, si l’honneur me pique à terre quand j’avance ! Que faire alors ? L’honneur peut-il me raccommoder une jambe ? Non. Ou un bras ? Non. Ou dissiper la douleur d’une blessure ? Non. L’honneur ne sait donc rien en chirurgie ? Qu’est-ce que l’honneur ? Un mot. Qu’est-ce que ce mot, honneur ? Qu’est-ce que cet honneur ? De l’air. Une facture acquittée. Qui possède cela ? Celui qui mourut mercredi. Le sent-il ? Non. L’entend-il ? Non. C’est insensible alors ? Oui, pour les morts. Mais cela ne vivra-t-il pas avec les vivants ? Non. Pourquoi ? La médisance ne le souffrira pas. — En ce cas je m’en passerai : L’honneur est un simple écusson, et ainsi finit mon catéchisme.

Vous devinez maintenant, n’est-ce pas, comment à propos des labeurs de Camoëns et de sa gloire tardive, j’ai pu m’écrier : O Falstaff, et songer à sa philosophie. Vous êtes d’une rare pénétration.

Venons enfin, cher Corsino, à vos dernières questions.

L’auteur de cette vie de Paganini dont vous me parlez, écrivait récemment à un de mes amis, en le priant d’obtenir de moi une analyse de son ouvrage dans le Journal des Débats ; espérant, disait-il, que je ne me laisserais pas influencer dans cette appréciation par ma haine pour la musique italienne et pour les Italiens. J’ai donc lu sa brochure. Il m’a été facile de répondre aux reproches violents qui m’y sont adressés. Mais cette réplique faite, on m’a détourné de la publier dans un journal, afin de ne pas donner lieu à une polémique qui, n’intéressant que moi, y serait nécessairement déplacée. Ici le cas n’est plus le même, et je ne suis pas fâché, puisque vous avez lu l’accusation, de vous faire connaître la défense.