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Les chœurs des églises d’Italie sont en général peu nombreux ; ils se composent de vingt à trente voix au plus, aux jours des grandes solennités. Les choristes m’ont paru assez bien choisis ; ils chantent sans nuances, il est vrai, mais juste et avec ensemble ; et il faut évidemment les placer à part fort au-dessus des malheureux braillards des théâtres, dont je m’abstiens de te parler.

Adieu, je te quitte pour écrire encore à Mina ; serai-je plus heureux cette fois, et me répondra-t-elle enfin !

Ton ami, Xilef.

PARIS.

(Un salon splendidement meublé).

MINA (seule).

Ah ça ! mais, il me semble que je vais m’ennuyer ! Ces messieurs se moquent-ils de moi ! Comment ! pas un d’eux n’a encore songé à me proposer quelque chose d’amusant pour aujourd’hui ! Me voilà seule, abandonnée depuis quatre longues heures. Le baron lui-même, le plus attentif, le plus empressé de tous, n’est pas encore venu !… Peut-être ont-ils bien fait, ma foi, de me laisser tranquille, ils sont si cruellement sots tous ces beaux qui m’adorent. Ils ne savent jamais me parler que de fêtes, de courses, d’intrigues, de scandales, de toilette ; pas un mot qui décèle l’intelligence ou le sentiment de l’art, rien qui vienne du cœur. Et je suis artiste avant tout, moi, et artiste par… l’âme, par le cœur. D’où vient que j’hésite à le dire ?… Suis-je bien sûre, dans le fait, d’avoir un cœur et une âme ?… Peuh ! Voilà déjà que je ne me sens plus le moindre amour pour Xilef. Je n’ai pas même répondu à ses brûlantes lettres. Il m’accuse, il se désespère, et je pense à lui… quelquefois, mais rarement. Allons, ce n’est pas ma faute, si, comme le dit mon imbécile de baron, les absents ont toujours tort, et les présents sont toujours