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atteignait presque aux chapiteaux de la colonnade, indiquaient la place que devaient occuper les diverses écoles, et portaient le nom des paroisses ou des quartiers de Londres auxquels elles appartiennent. Au moment de l’entrée des groupes d’enfants, les compartiments des amphithéâtres, se peuplant successivement du haut en bas, formaient un coup d’œil singulier, rappelant le spectacle qu’offre dans le monde microscopique le phénomène de la cristallisation. Les aiguilles de ce cristal aux molécules humaines, se dirigeant toujours de la circonférence au centre, étaient de deux couleurs, le bleu foncé de l’habit des petits garçons sur les gradins d’en haut, et le blanc de la robe et de la coiffe des petites filles occupant les rangs inférieurs. En outre, les garçons portant sur leur veste, les uns une plaque de cuivre poli, les autres une médaille d’argent, leurs mouvements faisaient scintiller la lumière réfléchie par ces ornements métalliques, de manière à produire l’effet de mille étincelles s’éteignant et se rallumant à chaque instant sur le fond sombre du tableau. L’aspect des échafaudages couverts par les filles était puis curieux encore ; les rubans verts et roses qui paraient la tête et le cou de ces blanches petites vierges, faisaient ressembler exactement cette partie des amphithéâtres à une montagne couverte de neige, au travers de laquelle se montrent ça et là des brins d’herbe et des fleurs. Ajoutez les nuances variées qui se fondaient au loin dans le clair-obscur du plan incliné, où siégeait l’auditoire, la chaire tendue de rouge de l’archevêque de Cantorbéry, les bancs richement ornés du lord-maire et de l’aristocratie anglaise sur le parvis au-dessous de la coupole, puis à l’autre bout et tout en haut les tuyaux dorés du grand orgue ; figurez-vous cette magnifique église de Saint-Paul, la plus grande du monde après Saint-Pierre, encadrant le tout, et vous n’aurez encore qu’une esquisse bien pâle de cet incomparable spectacle. Et partout un ordre, un recueillement, une sérénité qui en doublaient la magie. Il n’y a pas de mises en scène, si admirables qu’on les suppose, qui puissent jamais approcher de cette réalité que je crois avoir vue en songe à l’heure qu’il est. Au fur et à mesure que les enfants,