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Une mort sans gloire Termine nos jours.

les voix passent de sol mineur en la bémol majeur ; et l’étonnante exclamation du grand prêtre dans la Vestale, où la voix tombe brusquement de la tonalité de ré bémol majeur à celle d’ut majeur sur ce vers :

Vont-ils dans le chaos replonger l’univers ?

C’est encore Spontini qui inventa le crescendo colossal, dont ses imitateurs ne nous ont donné ensuite qu’un diminutif microscopique. Tel est celui du second acte de la Vestale, quand Julia, délirante et ne résistant plus à sa passion, sent la terreur s’y joindre et grandir avec l’amour dans son âme bouleversée :

Où vais-je ?… ô ciel ! et quel délire S’est emparé de tous mes sens ? Un pouvoir invincible à ma perte conspire ; Il m’entraîne… Il me presse… Arrête ! Il en est temps !

Cette progression d’harmonies gémissantes entrecoupées de sourdes pulsations de plus en plus violentes, est une invention étonnante, dont on ne sent tout le prix qu’à la représentation et non au concert. Il en est de même du crescendo du premier finale de Cortez, quand les femmes mexicaines, éperdues de terreur, accourent se jeter au pieds de Montezuma :

Quels cris retentissent : Tous nos enfants périssent !

J’ai déjà cité celui du finale de la Vestale. Maintenant parlerai-je du duo entre Telasco et Amazily, qui débute par le plus admirable récitatif peut-être qui existe ? de celui entre Amazily et Cortez où les fanfares guerrières de l’armée espagnole s’unissent d’une façon si dramatique aux adieux passionnés des deux amants ? de l’air grandiose de Telasco : « O patrie ! ô lieux pleins de charmes ! » de celui de Julia dans la Vestale : « Impitoyables dieux ! » de la marche funèbre, de l’air du tombeau dans le même opéra, du duo entre Licinius et le grand prêtre, duo que Weber a déclaré l’un des plus étonnants qu’il connût ?…