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« Grâce ! que de cruauté ! » Dans un autre ouvrage, au lieu de « Bonheur suprême ! » il laissa échapper : « Douleur extrême ! » et, depuis ce lapsus, de mauvais plaisants sans cœur l’appelèrent le souffle-douleur de l’Opéra. Puis il tomba malade, il cessa de parler. Nul médecin ne put obtenir de lui l’aveu de ce qu’il ressentait. On le voyait seulement, pendant ses longs assoupissements, faire par intervalles un petit soubresaut de la tête, comme s’il eût reçu un coup sur l’occiput. Enfin, un soir, après avoir été parfaitement calme pendant quelques heures, quand ses amis commençaient à croire à une amélioration dans son état, il fit encore une fois le petit soubresaut dont je viens de parler, et, prononçant d’une voix douce ce seul mot : Tack ! il expira.

. . . . . . . . Long silence . . . . . . . .

On soupire.... Puis on entend ces exclamations (Winter) : « Poor Wretch ! — (Corsino) Ohi me ! povero ! — (Dimsky) Pauvre diable ! — (Kleiner Jeune) Voilà une vexation ! » Le chef d’orchestre, ce mauvais cœur, qui en écoutant mon funeste récit n’a pu contenir plusieurs accès d’un rire silencieux, décélés par les bonds précipités de son abdomen, reprend un air grave et nous dit en descendant de son estrade : « Silence, messieurs, la pièce est finie. »