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pièce en supprimant tout le reste, fut plus tard tronqué dans sa péroraison pour garantir un chanteur du danger que lui présentait la dernière phrase,

Trompons l’espérance homicide.


Eh bien ! cette péroraison ne vient-elle pas d’être restituée au morceau ? N’a-t-on pas poussé la condescendance jusqu’à faire entendre au dénoûment le magnifique chœur final avec ses larges harmonies sur lesquelles retentissent si poétiquement des réminiscences d’airs nationaux suisses ? et le trio avec accompagnement d’instruments à vent, et même la prière pendant l’orage, qu’on avait supprimée avant la première représentation ? Car dès le début déjà, aux répétitions générales, les hommes capables du temps s’étaient mis à l’œuvre sur l’œuvre, ainsi que cela se pratique en pareil cas, pour donner de bonnes leçons à l’auteur, et bien des choses qui, à leur avis, devaient infailliblement compromettre le succès du nouvel opéra, en furent impitoyablement arrachées. Et ne voilà-t-il pas toutes ces belles fleurs mélodiques qui repoussent maintenant, sans que le succès de l’œuvre soit moindre qu’auparavant, au contraire ? Il n’y a guère que le duo « Sur la rive étrangère » qu’on n’a pas cru prudent de laisser chanter. On ne peut pas donner le chef-d’œuvre de Rossini absolument tel qu’il l’a composé, que diable ! ce serait trop fort et d’un trop dangereux exemple. Tous