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quantité aussi prodigieuse et d’aussi bonne qualité qu’à Paris. Ce que deviennent ces innombrables produits est un mystère qu’il ne m’a été donné de pénétrer jusqu’ici. Si on les brûlait, ils deviendrait de la cendre, on en ferait même de la potasse utile dans le commerce. Mais on se garde bien de les livrer aux flammes, je m’en suis informé ; on conserve avec soin, au contraire, ces masses de papier de musique, parties d’orchestre, parties de chant, rôles et partitions qui coûtèrent si cher à couvrir de notes, et dont la valeur, au bout de quelques années, est celle des feuilles mortes amassées par l’hiver au fond des bois. Où les cache-t-on, ces monceaux de papier ? où trouve-t-on des greniers, des hangars, des caves pour les y entasser ? à Paris, où le terrain est à si haut prix, où les auteurs d’opéras comiques ont eux-mêmes tant de peine à se loger ?… La statistique est aussi ignorante à ce sujet que sur le chapitre des moineaux. Que deviennent les moineaux de Paris ? Toutes les recherches des savants ont été vaines jusqu’à ce jour pour éclaircir cette question, qui n’est pas sans importance pourtant, qui en a même beaucoup plus que celle relative aux opéras comiques. En effet, en supposant qu’un couple de ces mélodieux oiseaux vive cinq ans, chaque couple produisant deux nichées par saison, chaque nichée étant de quatre petits au moins, c’est donc quatre couples de plus au bout d’un an ; lesquels couples produisant à leur tour, sans que leurs parents pendant quatre années cessent de produire, doivent nécessairement donner naissance, au bout d’un