instruit dans l’art du chant, pour battre la mesure et faire les observations critiques — un bon pianiste jouant une partition de piano bien faite sur un bon piano — et un violoniste pour jouer à l’unisson ou à l’octave des voix chaque partie étudiée isolément ; au lieu de ces trois artistes indispensables, on les confie, dans les deux tiers des théâtres lyriques de l’Europe, à un seul homme qui n’a pas plus d’idée de l’art de conduire que de celui de chanter, peu musicien en général, choisi parmi les plus mauvais pianistes qu’on a pu trouver, ou plutôt qui ne joue pas du piano du tout, déplorable invalide qui, assis devant un instrument délabré, discordant, tâche de déchiffrer une partition disloquée qu’il ne connaît pas, frappe des accords faux, majeurs quand ils sont mineurs et réciproquement, et, sous prétexte de conduire et d’accompagner à lui tout seul, emploie sa main droite pour que les Choristes se trompent de rhythme et sa main gauche pour qu’ils se trompent d’intonations.
On se croirait au moyen âge, quand on est témoin de cette économique barbarie…..
Une interprétation fidèle, colorée, inspirée, d’une œuvre moderne, confiée même à des artistes d’un ordre élevé, ne se peut obtenir, je le crois fermement, que par des répétitions partielles. Il faut faire étudier chaque partie d’un chœur isolément, jusqu’à ce qu’elle soit bien sue, avant de l’admettre dans l’ensemble. La même marche est à suivre pour l’orchestre d’une symphonie un peu compliquée. Les violons doivent être exercés seuls d’abord ; d’autre part les Altos et les Basses, puis les instruments à vent en bois (avec un petit groupe d’instruments à cordes pour remplir les silences et accoutumer les instruments à vent aux rentrées), les instruments en cuivre également ; très souvent même il est nécessaire d’exercer seuls les instruments à percussion, et enfin les Harpes, s’il y en a une masse. Les études d’ensemble sont ensuite bien plus fructueuses et plus rapides, et l’on peut se flatter d’arriver ainsi à une fidélité d’interprétation dont la rareté, hélas ! n’est que trop bien prouvée.