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dans les récitatifs, de diviser la mesure régulièrement et de marquer les temps réels à leur place, comme dans la musique mesurée. Je conseille donc, pour l’exemple précédent, de frapper le premier temps en bas comme à l’ordinaire, et de porter le bâton à gauche pour faire attaquer l’accord sur le second temps ; et ainsi de suite pour les cas analogues en divisant toujours la mesure régulièrement. Il est très important en outre de la diviser d’après le mouvement précédemment indiqué par l’auteur, et de ne pas oublier, si ce mouvement est allegro ou maestoso, et si la partie récitante a longtemps récité sans accompagnement, de donner à tous les temps, quand l’orchestre rentre, la valeur de ceux d’un allegro ou d’un maestoso. Car quand l’orchestre joue seul il est en général mesuré ; il ne joue sans mesure que s’il accompagne la voix récitante ou l’instrument récitant. Dans le cas exceptionnel où le récitatif est écrit pour l’orchestre lui-même, ou pour le chœur, ou bien pour une partie de l’orchestre ou du chœur, comme il s’agit de faire marcher ensemble, soit à l’unisson, soit en harmonie, mais sans mesure exacte, un certain nombre d’exécutants, c’est alors le chef d’orchestre qui est le vrai récitant et qui donne à chaque temps de la mesure la durée qu’il juge convenable. Suivant la forme de la phrase, tantôt il divise et subdivise les temps, tantôt il marque les accents, tantôt les doubles croches s’il y en a, enfin il dessine avec son bâton la forme mélodique du récitatif. Bien entendu que les exécutants, sachant leurs notes à peu près par cœur, ont l’œil constamment fixé sur lui, sans quoi on ne peut obtenir ni assurance ni ensemble.

En général, même pour la musique mesurée, le chef d’orchestre doit exiger que les musiciens qu’il dirige le regardent le plus souvent possible. Pour un orchestre qui ne regarde pas le bâton conducteur, il n’y a pas de chef. Souvent, après un point d’orgue, par exemple, le chef est obligé de s’abstenir de faire le geste décisif qui va déterminer l’attaque de l’orchestre, jusqu’à ce qu’il voie les veux de tous les