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composé de Roméo, le Roi Lear, la Ballade sur la mort d’Ophélie et la Tempête. Nous avons eu ensemble une conférence avant-hier, à ce sujet, et je leur ai déclaré qu’à aucun prix, je ne consentirais à organiser cette exécution, s’ils ne m’assuraient quinze jours d’étude pour les voix et quatre répétitions pour l’orchestre. Ils se concertent maintenant à ce sujet.

La Société philharmonique a commencé ses séances avant-hier. On y a exécuté une symphonie de Hesse (l’organiste de Breslau) bien faite, bien froide, bien inutile ; une autre en la de Mendelssohn, admirable, magnifique, bien supérieure, selon moi, à celle également en la qu’on joue à Paris. L’orchestre est très bon ; à l’exception de quelques instruments à vent, il n’y a rien à lui reprocher, et Costa le dirige à merveille. Personne ne voulait croire, ce soir-là, que la Société ne m’eût encore rien demandé pour ses concerts ; c’est pourtant vrai. On dit qu’ils y seront forcés par les journaux et par leur comité. Mais je ne me livrerai qu’avec de grandes précautions aux pattes de velours de tous les vieillards entêtés qui dirigent l’institution. C’est la répétition des manières du Conservatoire de Paris.

J’aurais trop à te dire sur ces petites vanités fiévreuses et goutteuses ; et tu les devines sans peine. En résumé, je resterai ici tant que je pourrai, car il faut du temps pour s’y faire place et s’y créer une position. Heureusement, les circonstances sont favorables. Tôt ou tard, cette position arrivera et sera, me dit-on, solide. Je n’ai plus à songer, pour ma carrière musicale, qu’à l’Angleterre ou à la Russie. J’avais, depuis longtemps, fait mon deuil de la France ; la dernière révolution rend ma détermination plus ferme et