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J’ai donc rendu leur dernière parole à MM. les directeurs de l’Opéra et j’ai accepté la proposition que m’a faite Jullien (le directeur du théâtre de Drury Lane) de conduire l’orchestre. Il me donne pour cela dix mille francs, plus dix autres mille francs pour monter quatre concerts avec ma musique ; en outre, il m’engage pour écrire un opéra en trois actes destiné à la seconde année. Je ne serai occupé à Londres que quatre mois de l’année. Tu vois qu’il n’y avait pas à hésiter et que j’ai dû définitivement renoncer à la belle France pour la perfide Albion.

Je vais écrire encore une lettre pour les Débats et je partirai pour la Côte. La première sur Vienne a paru avant-hier. Je t’adresserai celles sur la Russie : c’est convenu.

Je m’attends à être passablement assommé par les conversations côtoises, viennoises et grenobloises ; mais je suis bronzé à ce sujet depuis longtemps et je pense que je me tirerai à mon honneur de cette nouvelle épreuve.

D’après ce que tu me narres, je vois d’ailleurs que nous sommes beaucoup moins melons en Dauphiné qu’en Provence. On s’y occupe même énormément de littérature moderne, — pour la dénigrer, bien entendu. On en est à Voltaire ; mais enfin on lit, et, comme aux bords de la Garonne…

On lit, on jase, on déraisonne, On absurde un petit moment…

Il faut faire le verbe absurder.

Si je pars assez tôt pour la Côte, comme tu ne reviens qu’en octobre, je suis fort capable d’aller te dire bonjour à Avignon.