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dre sur un autre, dont le sens harmonique incomplet est le seul qui pût permettre de finir, en laissant l’auditeur dans le vague et en augmentant l’impression de tristesse rêveuse où tout ce qui précède a dû nécessairement le plonger.— Le motif du scherzo est modulé d’une façon très-neuve. Il est en fa majeur et, au lieu de se terminer, à la fin de la première reprise : en ut, en si bémol, en ré mineur, en la mineur, en la bémol, ou en ré bémol, comme la plupart des morceaux de ce genre, c’est au ton de la tierce supérieure, c’est à la naturel majeur que la modulation aboutit. Le scherzo de la symphonie pastorale, en fa comme celui-ci, module à la tierce inférieure, en ré majeur. Il y a quelque ressemblance dans la couleur de ces enchaînements de tons ; mais l’on peut remarquer encore d’autres affinités entre les deux ouvrages. Le trio de celui-ci (presto meno assaï), où les violons tiennent presque continuellement la dominante, pendant que les hautbois et les clarinettes exécutent une riante mélodie champêtre au-dessous, est tout à fait dans le sentiment du paysage et de l’idylle. On y trouve encore une nouvelle forme de crescendo, dessinée au grave par un second cor, qui murmure les deux notes la, sol dièse, dans un rhythme binaire, bien que la mesure soit à trois temps, et en accentuant le sol dièse, quoique le la soit la note réelle. Le public paraît toujours frappé d’étonnement à l’audition de ce passage.

Le finale est au moins aussi riche que les morceaux précédents en nouvelles combinaisons, en modulations piquantes, en caprices charmants. Le thème offre quelques rapports avec celui de l’ouverture d’Armide, mais c’est dans l’arrangement des premières notes seulement, et pour l’œil plutôt que pour l’oreille ; car à l’exécution rien de plus dissemblable que ces deux idées. On apprécierait mieux la fraîcheur et la coquetterie de la phrase de Beethoven, bien différentes de l’élan chevaleresque du thème de Gluck, si les accords frappés à l’aigu par les instruments à vent dominaient moins les premiers vio-