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froids à l’orchestre, et ne monteront point au bout d’une heure, par le fait du souffle des exécutants et de leur immersion dans une atmosphère plus chaude que celle d’où ils sortent. C’est dire aussi que les instruments à vent d’un théâtre (d’un théâtre du gouvernement du moins) ne devront jamais en sortir, sous aucun prétexte. Ils resteront dans leur serre, comme les décors restent dans les magasins. Au reste, si quelque instrumentiste s’avisait, en emportant au dehors sa flûte où sa clarinette, de la faire couper, le méfait serait aussitôt reconnu, puisque le la de l’instrument coupé différerait de celui du tuyau d’orgue, qui, je le répète, devra seul être consulté pour accorder l’orchestre. Enfin le gouvernement, adoptant officiellement le la de 898 vibrations, tout fabricant qui aura mis en circulation des instruments à vent, des orgues, des pianos accordés au-dessus de ce la, sera passible de certaines peines, comme les marchands qui vendent à fausse mesure et à faux poids.

De telles précautions une fois prises, et ces règlements étant rigoureusement exécutés et maintenus, à coup sûr le diapason ne montera plus.

Mais le remède sera inutile pour conserver les voix, si les compositeurs continuent à écrire les notes dangereuses que j’ai citées tout à l’heure.

L’autorité devrait donc encore intervenir et interdire aux compositeurs (à ceux qui écrivent pour les théâtres subventionnés tout au moins) l’emploi des sons exceptionnels qui ont détruit tant de beaux organes, et leur conseiller (une partition échappant nécessairement sous ce rapport à toute censure) plus d’à-propos et plus d’adresse dans l’emploi des moyens violents de l’instrumentation.