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signora Faustina (que je suppose être Alceste) sur la seconde syllabe du mot risor-ge,

In me a poco a poco
Risorge l’amor.

En général le compositeur paraît avoir mesuré la longueur de ses vocalises à la célébrité du dio ou de la diva qui devait le chanter. Les passages des airs de la Faustina, cette déesse élève de Marcello et qui fut la femme de Hasse, sont interminables ; ceux de la Cuzzoni sont un peu moins longs ; ceux du signor Baldi moins longs encore ; la povera ignota Dotti, dans son air unique, n’en a pas. Quand le passage de rigueur est arrivé à sa cadence de conclusion, une seconde partie de l’air conduit le chant dans un des tons relatifs du ton principal, une nouvelle cadence s’accomplit dans ce nouveau ton, presque toujours avec accompagnement des basses seules, et l’on recommence jusqu’au point d’orgue final.

On doit supposer qu’assujetti à l’application constante de ce procédé, le musicien ne pouvait guère se préoccuper de la vérité d’expression et de caractère. Handel en effet n’y songeait guère et ses chanteurs se fussent révoltés s’il y eût songé.

Je n’ai rien dit de l’ouverture ni de la sinfonia qui ouvre le second acte. Je ne saurais, par l’analyse, donner une idée d’une pareille musique instrumentale. Cet Admetus précéda de plusieurs années l’Alceste italienne de Gluck. Peut-être même fut-il représenté à l’époque où ce dernier, jeune encore, écrivait pour le théâtre italien de Londres de mauvais ouvrages, tels que Pyrame et Thisbé et la Chute des Géants. On peut supposer alors que l’Admetus donna à Gluck l’idée de son Alceste.

C’est sans doute aussi après avoir entendu les deux mauvais opéras italiens de Gluck que Handel dit un jour, en parlant de lui : « Mon cuisinier est plus musicien que cet homme-là. »

Handel, il faut le croire, était trop impartial pour ne pas rendre pleine justice à son cuisinier. Reconnaissons seulement