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que mon travail devait avoir surtout pour but de chercher une belle simplicité, et j’ai évité de faire parade de difficultés aux dépens de la clarté ; je n’ai attaché aucun prix à la découverte d’une nouveauté, à moins qu’elle ne fût naturellement donnée par la situation et liée à l’expression ; enfin il n’y a aucune règle que je n’aie cru devoir sacrifier de bonne grâce en faveur de l’effet. »

Cette profession de foi nous paraît admirable, en général, de franchise et de raison ; les points de doctrine qui en forment le fond, et dont on a fait depuis quelques années un abus si monstrueux et si ridicule, sont basés sur des raisonnements fort justes et sur un profond sentiment de la vraie musique dramatique. À part quelques-uns que nous signalerons tout à l’heure, ces principes sont d’une telle excellence, qu’ils ont été en grande partie suivis par la plupart des grands compositeurs de toutes les nations. Maintenant Gluck, en promulguant cette théorie dont le moindre sentiment de l’art et même le simple bon sens démontraient à son époque la nécessité, n’en a-t-il pas un peu exagéré en quelques endroits les conséquences ? C’est ce qu’on méconnaîtra difficilement après un examen impartial, et lui-même dans ses ouvrages ne l’a pas appliquée avec une rigoureuse exactitude. Ainsi, dans l’Alceste italienne, on trouve des récitatifs accompagnés seulement de la basse chiffrée et probablement par les accords du cembalo (clavecin), comme il était d’usage alors dans les théâtres italiens. Il résulte pourtant de cette sorte d’accompagnement et de ce genre de récitation vocale une disparate fort tranchée entre le récitatif et l’air.

Plusieurs de ses airs sont précédés d’un assez long solo instrumental ; il faut bien alors que le chanteur garde le silence et attende la fin de la ritournelle. En outre, il emploie fréquemment une forme d’airs qu’il aurait dû proscrire dans sa théorie sur la musique dramatique. Je veux parler des airs à reprises dont chaque partie se dit deux fois sans que cette ré-