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Sur l’enfer, sur la mort j’emporte la victoire ;
xxxxIl ne manque plus à ma gloire
xxxxQue de triompher de l’Amour.

Et voilà pourquoi ce curieux opéra s’appelle Alceste ou le Triomphe d’Alcide. On trouve encore dans cette tragédie lyrique beaucoup d’autres personnages que je n’ai pas désignés. Il y a, entre autres, une petite drôlesse de quinze ans, suivante d’Alceste, aimée de Lycas et de Straton, confidents d’Hercule et de Lycomède, et qui débite des moralités de cette force quand ses deux amoureux la pressent de faire un choix entre eux :

Je n’ai point de choix à faire :
Parlons d’aimer et de plaire,
Et vivons toujours en paix.
L’hymen détruit la tendresse
Il rend l’amour sans attraits :
Voulez-vous aimer sans cesse ?
Amants, n’épousez jamais.

Boileau, convenons-en, n’avait pas grand tort de fustiger cette poésie de confiseur et de perruquier :

Et tous ces lieux communs de morale lubrique
Que Lulli réchauffa des sons de sa musique.

Seulement il aurait dû dire : que Lulli refroidit, car rien de glacial, de languissant, de plat, de misérable comme les sons de cette musique à la fois vieillote et enfantine.

L’excellent chanteur Alizard a fait entendre plusieurs fois dans les concerts, et non sans succès, la scène de Caron avec les ombres.

Le rhythme donne à ce morceau une certaine rondeur bouffonne qui plaisait au public et qu’on applaudissait en riant, sans savoir précisément si l’on riait des paroles ou de la musique. L’expression de la partie de chant est vraie, et le thème :

Il faut passer tôt ou tard,
Il faut passer dans ma barque,