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BERKELEY

5o  Dans un mouvement circulaire qui n’est que relatif, il n’y a pas de force centrifuge, tandis que dans le mouvement circulaire vrai, ou absolu, la force centrifuge est proportionnelle à la quantité de mouvement.

112. Mais, nonobstant ces propositions, je dois avouer qu’il me semble à moi qu’il ne peut exister de mouvement, si ce n’est relatif. Pour concevoir un mouvement, il faut concevoir au moins deux corps dont la distance ou position mutuelle est changée. Si donc il n’existait qu’un corps unique, il ne serait pas possible qu’il se mût. Ceci me semble très évident, en ce que l’idée que j’ai du mouvement implique nécessairement relation. [Quant à savoir si d’autres peuvent l’entendre différemment, un peu d’attention leur montrera ce qu’il en est.]

113. Mais quoique, en tout mouvement, on doive nécessairement concevoir plus d’un corps, il peut se faire cependant qu’un seul se meuve, savoir, celui auquel est appliquée la force qui cause le changement dans la distance ou la situation des corps. Sans doute le mouvement relatif peut s’entendre de telle sorte que tout corps s’appelle duquel la distance vient à changer par rapport à un autre corps, soit que la force < ou action > qui cause le changement lui soit ou non appliquée à lui-même. Cependant [je ne saurais accepter cette manière de voir, puisque l’on nous dit que] le mouvement relatif est celui qui est perçu par les sens et qui regarde les choses ordinaires de la vie, et dans ce cas tout homme pourvu de sens commun doit savoir ce que c’est aussi bien que le plus grand philosophe ; or, je le demande à tout homme, en ce sentiment qu’il a de son mouvement quand il va dans les rues, les pierres qu’il dépasse peuvent-elles être dites se mouvoir par la raison que la distance où elles sont de ses pieds change ? Il me semble qu’encore que le mouvement implique relation d’une chose à une autre, il n’est pas nécessaire pour cela que le nom de la relation s’applique à chacun de ses deux termes. Un homme peut bien penser à quelque chose qui ne pense pas. De même un corps peut être mû, s’approcher ou s’éloigner d’un autre corps, sans que celui-ci soit en mouvement. [Je parle du mouvement relatif, car je ne saurais en concevoir un autre.]

114. Suivant que le lieu est défini de différentes manières,