nous l’ayons faite, n’aura la même souplesse que les choses. Soyons donc prêts à l’abandonner pour une autre, qui serrera l’expérience de plus près encore. « Nos idées, disait Claude Bernard, ne sont que des instruments intellectuels qui nous servent à pénétrer dans les phénomènes ; il faut les changer quand elles ont rempli leur rôle, comme on change un bistouri émoussé quand il a servi assez longtemps. » Et il ajoutait : « Cette foi trop grande dans le raisonnement, qui conduit un physiologiste à une fausse simplification des choses, tient à l’absence du sentiment de la complexité des phénomènes naturels. » Il disait encore : « Quand nous faisons une théorie générale dans nos sciences, la seule chose dont nous soyons certains c’est que toutes ces théories sont fausses, absolument parlant. Elles ne sont que des vérités partielles et provisoires, qui nous sont nécessaires comme les degrés sur lesquels nous nous reposons pour avancer dans l’investigation. » Et il revenait sur ce point quand il parlait de ses propres théories : « Elles seront plus tard remplacées par d’autres, qui représenteront un état plus avancé de la question, et ainsi de suite. Les théories sont comme des degrés successifs que monte la science en élargissant son horizon. » Mais rien de plus significatif que les paroles par lesquelles s’ouvre un des derniers paragraphes de l’Introduction à la médecine expérimentale : « Un des plus grands obstacles qui se rencontrent dans cette marche générale et libre des connaissances humaines est la tendance qui porte les diverses connaissances à s’individualiser dans des systèmes… Les systèmes tendent à asservir l’esprit humain… Il faut chercher à briser les entraves des systèmes philosophiques et scientifiques… La philosophie et la science ne doivent pas être systématiques. » La philosophie ne doit pas être systématique ! C’était là un paradoxe à l’époque
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