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plus maintenant que le tout de la réalité inconnaissable en soi, sur lequel s’étend le tout de notre représentation. Nous voilà dans le réalisme ; et, pas plus dans ce réalisme que dans l’idéalisme de tout à l’heure, les états cérébraux ne sont l’équivalent de la représentation : c’est, nous le répétons, le tout des objets perçus qui entrera encore (cette fois dissimulé) dans le tout de notre perception. Mais voici que, descendant au détail du réel, on continue à le composer de la même manière et selon les mêmes lois que la représentation, ce qui équivaut à ne plus les distinguer l’un de l’autre. On revient donc à l’idéalisme, et l’on devrait y rester. Point du tout. On conserve bien le cerveau tel qu’il est représenté, mais on oublie que, si le réel est déplié dans la représentation, étendu en elle et non plus tendu en lui, il ne peut plus receler les puissances et virtualités dont parlait le réalisme ; on érige alors les mouvements cérébraux en équivalents de la représentation entière. On a donc oscillé de l’idéalisme au réalisme et du réalisme à l’idéalisme, mais si rapidement qu’on s’est cru immobile et, en quelque sorte, à califourchon sur les deux systèmes réunis en un seul. Cette apparente conciliation de deux affirmations inconciliables est l’essence même de la thèse du parallélisme.

Nous avons essayé de dissiper l’illusion. Nous ne nous flattons pas d’y avoir entièrement réussi, tant il y a d’idées, sympathiques à la thèse du parallélisme, qui se groupent autour d’elle et en défendent l’abord. De ces idées les unes ont été engendrées par la thèse du parallélisme elle-même ; d’autres au contraire, antérieures à elle, ont poussé à l’union illégitime d’où nous l’avons vue naître ; d’autres enfin, sans relations de famille avec elle, ont pris