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ment réaliste elle se formulerait ainsi : Une partie, qui doit tout ce qu’elle est au reste du tout, peut être conçue comme subsistant quand le reste du tout s’évanouit. Ou encore, plus simplement : Une relation entre deux termes équivaut à l’un d’eux.

Ou les mouvements d’atomes qui s’accomplissent dans le cerveau sont bien ce qu’ils étalent dans la représentation que nous en aurions, ou ils en diffèrent. Dans la première hypothèse, ils seront tels que nous les aurons perçus, et le reste de notre perception sera dès lors autre chose : il y aura, entre eux et le reste, un rapport de contenu à contenant. Tel est le point de vue idéaliste. Dans la seconde hypothèse, leur réalité intime est constituée par leur solidarité avec tout ce qui est derrière l’ensemble de nos autres perceptions ; et, par cela seul que nous considérons leur réalité intime, nous considérons le tout de la réalité avec lequel ils forment un système indivisé : ce qui revient à dire que le mouvement intracérébral, envisagé comme un phénomène isolé, s’évanouit, et qu’il ne peut plus être question de donner pour substrat à la représentation tout entière un phénomène qui n’en est qu’une partie, et une partie découpée artificiellement au milieu d’elle.

Mais la vérité est que le réalisme ne se maintient jamais à l’état pur. On peut poser l’existence du réel en général derrière la représentation : dès que l’on commence à parler d’une réalité en particulier, bon gré mal gré on fait plus ou moins coïncider la chose avec la représentation qu’on en a. Sur le fond de réalité cachée, où tout est nécessairement impliqué dans tout, le réalisme déroule les représentations explicites qui sont pour