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sui generis, intermédiaire entre la sensation et la représentation. Mais nous nous bornons à indiquer cette vue sans nous y arrêter. Le problème que nous posons ici ne peut être résolu d’une manière satisfaisante dans l’état actuel de la science psychologique.


Il nous reste, pour conclure, à montrer que cette conception de l’effort mental rend compte des principaux effets du travail intellectuel, et qu’elle est en même temps celle qui se rapproche le plus de la constatation pure et simple des faits, celle qui ressemble le moins à une théorie.

On s’accorde à reconnaître que l’effort donne à la représentation une clarté et une distinction supérieures. Or, une représentation est d’autant plus claire qu’on y relève un plus grand nombre de détails, et elle est d’autant plus distincte qu’on l’isole et qu’on la différencie mieux de toutes les autres. Mais si l’effort mental consiste en une série d’actions et de réactions entre un schéma et des images, on comprend que ce mouvement intérieur aboutisse, d’une part, à mieux isoler la représentation, et, d’autre part, à l’étoffer davantage. La représentation s’isole de toutes les autres, parce que le schéma organisateur rejette les images qui ne sont pas capables de le développer, et confère ainsi une individualité véritable au contenu actuel de la conscience. Et, d’autre part, elle se remplit d’un nombre croissant de détails, parce que le développement du schéma se fait par l’absorption de tous les souvenirs et de toutes les images que ce schéma peut s’assimiler. Ainsi, dans l’effort intellectuel relativement simple qu’est l’attention donnée à une perception, il semble bien, comme