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de l’univers. Le physicien qui construit la Science sera attaché à ce trièdre. Le sommet du trièdre lui servira généralement d’observatoire. Nécessairement les points du système de référence seront en repos les uns par rapport aux autres. Mais il faut ajouter que, dans l’hypothèse de la Relativité, le système de référence sera lui-même immobile pendant tout le temps qu’on l’emploiera à référer. Que peut être en effet la fixité d’un trièdre dans l’espace sinon la propriété qu’on lui octroie, la situation momentanément privilégiée qu’on lui assure, en l’adoptant comme système de référence ? Tant que l’on conserve un éther stationnaire et des positions absolues, l’immobilité appartient pour tout de bon à des choses ; elle ne dépend pas de notre décret. Une fois évanoui l’éther avec le système privilégié et les points fixes, il n’y a plus que des mouvements relatifs d’objets les uns par rapport aux autres ; mais comme on ne peut pas se mouvoir par rapport à soi-même, l’immobilité sera, par définition, l’état de l’observatoire où l’on se placera par la pensée : là est précisément le trièdre de référence. Certes, rien n’empêchera de supposer, à un moment donné, que le système de référence est lui-même en mouvement. La physique a souvent intérêt à le faire, et la théorie de la Relativité se place volontiers dans cette hypothèse. Mais quand le physicien met en mouvement son système de référence, c’est qu’il en choisit provisoirement