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reste des choses tant de continuité, qu’on devine ce qu’il doit y avoir d’artificiel et de conventionnel dans notre répartition de la matière en corps. Mais si chaque corps, pris isolément et arrêté là où nos habitudes de perception le terminent, est en grande partie un être de convention, comment n’en serait il pas de même du mouvement considéré comme affectant ce corps isolément ? Il n’y a qu’un mouvement, disions-nous, qui soit perçu du dedans, et dont nous sachions qu’il constitue par lui-même un événement : c’est le mouvement qui traduit à nos yeux notre effort. Ailleurs, quand nous voyons un mouvement se produire, tout ce dont nous sommes sûrs est qu’il s’accomplit quelque modification dans l’univers. La nature et même le lieu précis de cette modification nous échappent ; nous ne pouvons que noter certains changements de position qui en sont l’aspect visuel et superficiel, et ces changements sont nécessairement réciproques. Tout mouvement — même le nôtre en tant que perçu du dehors et visualisé — est donc relatif. Il va de soi, d’ailleurs, qu’il s’agit uniquement du mouvement de la matière pondérable. L’analyse que nous venons de faire le montre suffisamment. Si la couleur est une réalité, il doit en être de même des oscillations qui s’accomplissent en quelque sorte à l’intérieur d’elle : devrions-nous, puisqu’elles ont un caractère absolu, les appeler encore des mouvements ? D’autre part, comment mettre sur le même rang l’acte par lequel