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de Lorentz. Si l’on part du temps réel pour aboutir au temps réel, on a peut-être usé d’artifices mathématiques dans l’intervalle, mais ces artifices doivent avoir quelque connexion avec les choses. C’est donc la part du réel, la part du conventionnel, qu’il s’agit de faire. Nos analyses étaient simplement destinées à préparer ce travail.

Mais nous venons de prononcer le mot « réalité » ; et constamment, dans ce qui va suivre, nous parlerons de ce qui est réel, de ce qui ne l’est pas. Qu’entendrons-nous par là ? S’il fallait définir la réalité en général, dire à quelle marque on la reconnaît, nous ne pourrions le faire sans nous classer dans une école : les philosophes ne sont pas d’accord, et le problème a reçu autant de solutions que le réalisme et l’idéalisme comportent de nuances. Nous devrions, en outre, distinguer entre le point de vue de la philosophie et celui de la science : celle-là considère plutôt comme réel le concret, tout chargé de qualité ; celle-ci extrait ou abstrait un certain aspect des choses, et ne retient que ce qui est grandeur ou relation entre des grandeurs. Fort heureusement nous n’avons à nous occuper, dans tout ce qui va suivre, que d’une seule réalité, le temps. Dans ces conditions, il nous sera facile de suivre la règle que nous nous sommes imposée dans le présent essai : celle de ne rien avancer qui ne puisse être accepté par n’importe quel philosophe, n’importe