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« comme à la Chambre ». Chacun a « son Porel » à raconter. Tous sont des malmenés de l’Odéon. — Une fois, dit Clovis, je vais lui lire mon Danton. À la fin du premier acte, il me remercie, se lève, me serre la main et refuse d’entendre le reste !… — Qu’as-tu fait ? — J’ai repris mon manuscrit et je lui ai crié, en poussant la porte : — Je m’appelle Clovis Hugues, député des Bouches-du-Rhône, et, partout où je suis, quand je dis de mes vers, on m’en redemande !… — Du reste ça ne se passera pas comme ça. Il l’attend au rapport du budget des Beaux-Arts et, là, il le servira au Parlement — et à la France ! — Et tous se déchaînent. Nous devons être ridicules, mais le café est désert, heureusement. Willette rigole et Isambert flagelle son herbe sainte.

Dimanche 18. — Ce matin, chez Alexandre Dumas, à onze heures. Il doute que la Comédie se risque à faire les frais de la pièce, très coûteuse à bien monter. C’est l’obstacle, ce sera le prétexte. Du reste c’est charmant, avec ces rimes étonnantes qui sonnent au bout des vers comme des clochettes d’argent. J’ai eu raison d’adopter la forme versifiée, car il n’y avait pas, à proprement parler, de pièce dans le roman de Gautier. En somme l’essai lui paraît très curieux à tenter aux Français, et il verra Claretie aujourd’hui même.

À propos de romans mis à la scène il me parle de son Affaire Clémenceau, adaptée par d’Artois et dont il mène les dernières répétitions au Vaudeville. Tout au théâtre est affaire de tour de main. C’est un métier d’escamoteur. Il y a dans Clémenceau un mot qui peut emporter la pièce, s’il est mal présenté ou mal dit. La femme n’a jamais aimé que son mari en