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est noir sur l’Odéon. J’y lance de la télégraphie. Troisième roulement de tambour avant le combat, car je suis décidé à me battre, Gautier étant en cause en somme, autant et plus que moi peut-être.

— Gentille visite de José-Maria de Heredia. Il vient, et de lui-même, par sympathie confraternelle, me demander lecture de mon adaptation, curieux, me dit-il, de savoir comment j’ai pu m’en tirer. Sur les raisons que je lui expose qui m’ont déterminé à adopter la forme rimée, il m’approuve absolument. Le dialogue du livre doit rester descriptif, celui du théâtre est sentimental. La prose du roman de Gautier, si habilement découpée fût-elle, et par un d’Ennery même, n’eût rien rendu à la scène, et la trahison du chef-d’œuvre était double. Le vers seul sauvait tout. — Tu es un bon gendre, me dit Heredia, à présent voyons le poète. — L’excellent Heredia, toujours emballé, est en état lyrique permanent. L’alexandrin le grise. C’est à cela que je rends tout l’honneur de la joie sonore que lui cause la lecture, car il en jette trois cigares éteints et mâchurés. — Tu ne vas pas donner ça, je pense, à l’Odéon ? — Pourquoi donc ? — D’abord parce qu’il n’y a pas dans la troupe les diseurs de tes rimes. Ensuite… — Ensuite ?… — Rien, tiens-toi tranquille, mon petit Berge, laisse-toi faire, et à demain, à moins que je ne trouve pas Claretie chez lui ou au théâtre, et à après-demain alors. — J’ai fait observer à mon vieil ami qu’il allait perdre son temps, vu que non seulement je n’étais pas en bonne odeur chez Molière, mais encore que je me trouvais lié à Porel par la commande. — Porel ? Mais malheureux, il ne te jouera pas. Il n’y a, à Paris, que toi