de l’excellent bouillon de la veille. Ils parurent s’y trouver bien ensemble. Je salai, je poivrai, et j’allumai une cigarette.
Pendant ce temps, sur mes indications précises, le brave Charles découpait des rondelles de pain, qu’il faisait griller au bout d’un couteau sur le brasier de la cheminée, et les femmes de l’auberge épluchaient, épluchaient toujours d’autres oignons, sans but déterminé.
La cigarette achevée, je goûtai la préparation. Elle était inconcevablement fade. Avisant alors des piments rouges qui pendaient à la poutrelle, j’en ajoutai six à la mixture. Et je goûtai encore. Elle était trop forte. Je réclamai des tomates. On alla m’en chercher au village, et quand elles furent dans la marmite, la soupe prit un beau ton. On eût dit le golfe de Porto lui-même.
Charles avait fini par avoir un peu peur, car il adore son maître, et il me surveillait du coin de l’œil.
« Que penseriez-vous, fis-je pour le tranquilliser, de quelques jus de citron exprimés et d’une poignée de baies de genièvre ? C’est local d’abord, et puis c’est bon ensuite ! »
Et le geste suivit la parole.
« Est-ce que Monsieur mangera de sa soupe ? me répondit-il. Parce que si Monsieur ne devait pas en manger, je crois qu’il serait temps de la tremper. Il n’y a plus de pain à griller, et j’entends les voitures qui reviennent des Calanches. »
Les excursionnistes apparurent en effet à la porte.
« Quelle drôle d’odeur ! dit Vincent Bonnaud.