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débouché d’huile et de miel. Industrieuse et gaie, la population y dépasse aujourd’hui trois mille âmes.

Elle croîtra encore, car la Balagne est le pays des belles filles corses.

Il est aisé de le pressentir à la quantité d’enfants qui grouillent dans ses rues montueuses et fleuries. Je n’ai vu autant de gosses qu’à Cancale, ville également très prolifique, où l’Amour ne débande pas son arc. À Calenzana, il n’en perd pas une flèche.

Le bourg s’enorgueillit d’un souvenir historique un peu lointain, qui est la défaite des mercenaires allemands de Gênes par Ceccaldi, l’un de ses enfants. Cela se passait en 1332, sous Charles VI, et l’histoire ne nous est pas bien présente ; il n’y a guère parmi nous que le prince qui puisse en traiter sans faillir avec les Calenzanais.

Il est vrai qu’il se doit d’être renseigné, le prince Pierre, son père ayant vécu longtemps dans la commune.

Il passe même encore pour en être le bienfaiteur, à cause d’une fontaine publique qu’il donna à la ville. L’eau, en Corse, est un présent sans prix, et on y retrouve sur ce point la grande préoccupation des peuples pastoraux de l’Hellade, qui pour une fontaine rendaient un Théocrite. La source canalisée par le prince Pierre Bonaparte a enrichi les braves Calenzanais, ni plus ni moins. Ils le savent, ils le disent encore, et notre chef d’expédition a pu se rendre compte, à l’enthousiasme qui l’escorta pendant sa visite, de l’importance d’un bienfait assez idyllique en somme. La fontaine était festonnée de fleurs, adornée comme châsse, et il dut en boire un verre à la santé de la Balagne.