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et la française. En Paoli, on ne trouve que la deuxième.

À Corte, je fus extrêmement frappé de cette prédilection des insulaires pour leur Pascal Paoli. Elle est ethnique.

La maison de Paoli est bien municipal.

C’est la mairie, l’école et le musée.

Elle est publique, intacte et sacrée.

Les Corses veillent sur celle-là ; ils vont sans doute y placer les cendres que l’Angleterre restitue à leur vénération.

Lorsque nous arrivâmes dans cette petite ville sourcilleuse, au pied de laquelle deux torrents en collision vocifèrent, il y avait une course de chevaux corses sur le boulevard.

Ce boulevard, longue avenue ombreuse de platanes et dallée comme une rue italienne, aboutit à la place où le bronze du libérateur se dresse sur sa fontaine.

Là était le point d’arrivée et le but du steeple-chase. Montés à poil sur leurs petits chevaux noirs, chevelus, aux jambes fines, de jeunes gars de quinze à dix-huit ans, souples, ardents et nerveux, accouraient au triple galop du côté de Bastia, et les dalles de la rue sonnaient comme cloches à leur passage.

Quand on n’a pas vu un Corse à cheval, on ne sait pas ce que c’est que l’ivresse de la liberté.

Sous leurs vastes chapeaux de berger, aux ailes battantes, les regards des coureurs jetaient les feux du diamant noir.

Comme dans les bas-reliefs antiques, ils tenaient le bridon tendu de la main gauche, et la droite,