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Et ainsi de suite comme vous l’imaginez, d’après le Dante aux Halles.

Et c’est alors que, toutes ces têtes enfoncées et rendues à Satan pour sa fournaise, le sublime Georges embroche le Juge, comme aussi l’Avocat, et les rejette à l’enfer des carottiers, d’où ils viennent, selon la doctrine médiévale.

— Eh bien ! me dit Paul Arène, qu’en dis-tu, et écriras-tu désormais que le peuple veut du neuf au théâtre et même en toutes choses ? Il en est encore à Rutebœuf, à André de la Halle, et même à la nonne Hrotswita, pour ta gouverne. Je t’en avais promis la preuve démonstrative, tu l’as.

Il me montrait devant le cirque forain la cohue grossissante, à peine maintenue par les sergots de service, et qui attendait que notre fournée fût sortie pour envahir la salle. Quant au consul, son contentement était complet. Il se retrouvait en Chine où les traditions populaires alimentent encore au bout de cinq mille ans le théâtre du peuple le plus lettré qui soit au monde. Et Mlle Arène s’était déridée et elle déclarait qu’elle s’était beaucoup plus amusée qu’à l’Odéon.

J’ai souvent songé, je songe encore à cette leçon de haute critique que mon vieil ami me donna en famille et j’en suis à me demander si le mystère n’est pas la vraie forme dramatique en République, s’il n’y aurait pas tout profit, avec toute joie, à savoir des prolétaires ce qu’ils pensent de nos hommes et de nos écrits et à apprendre de la fourche démocratique de Georges qui sont ceux que la conscience des bonnes gens tient pour d’éternels carottiers.