Page:Bergerat - Souvenirs d’un enfant de Paris, vol. 3, 1912.djvu/24

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Lettre III


Dimanche 19 août.

Je suis bien sûr que tu ne te figures guère à quel degré d’émotion peut faire monter un simple défilé. Une suite d’hommes marchant processionnellement et portant quelque chose en l’honneur de quelqu’un, cela semble assez banal, n’est-ce pas ? et il n’y a pas là de quoi fondre en larmes. D’où vient donc que nous en étions si rudement empoignés ? Le Carolus, qui est le bourdon de la Cathédrale, venait de tinter le dernier coup de neuf heures ; des salves d’artillerie tonnaient dans le lointain, du côté du port et des bassins ; notre ami le carillonneur avait repris le « Beiaarlied » de M. Benoit et emplissait la ville d’un bruit de grelots ; il y avait déjà dans les rues une animation extraordinaire. Le chemin de fer avait déversé depuis le matin 45.000 visiteurs dans Anvers. Il faut te dire que dès le vendredi il n’était plus possible de trouver à louer quoi que ce fût ici dans les auberges ; nous ne nous sommes maintenus dans