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les braves gens ! Comme Henri Heine chez les Rothschild, ils me traitaient famillionnairement. À titre de rédacteur en chef, j’étais tenu à la fourniture de deux rédactions, l’artistique et la littéraire, « soit que j’en fusse l’auteur, soit qu’elles émanassent d’autres rédacteurs envers lesquels j’étais seul responsable, au taux de vingt-cinq centimes la ligne pour les articles et, pour les dessins, d’un prix d’usage, à créditer sur les comptes de la fin de la période d’essai. »

Sur ce créditement (dit-on : créditement, en langue commerciale ?) j’étais d’ores et déjà tranquille comme Baptiste ; poètes et peintres affluaient qui ne mettaient à leur collaboration qu’une seule clause, celle de n’être rétribués que par la gloire. La plupart étaient d’ailleurs de mes meilleurs amis. Armand Silvestre avait retenu la rubrique des Beaux-Arts, Louis de Fourcaud celle des Théâtres, Armand d’Artois la bibliographie, Victor Wilder la Musique. Mes dessinateurs illustrateurs étaient Daniel Vierge, Adrien Marie, Henri Pille, Eugène Courboin, Henri Scott, Georges Rochegrosse, Forain et de Liphart, tous engagés à fond dans ma fortune, bonne ou mauvaise.

Je n’ai pas le don de la parole. Je ne serais un orateur que si les glouglous d’une bouteille qu’on verse étaient chrysostomiques ; mais, un peu piqué de la brièveté du laps fixé à la période d’essai, j’avais interrompu Me Huillier dans la lecture du contrat au moment où il stipulait à M. Hennecart sa part de participation à la besogne collective. — « Troisièmement, M. Hennecart fournira tout le papier nécessaire à la publication du journal… Pour la période