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comme le gilet. Toujours est-il que vingt-ans après, en 1887, me trouvant moi-même à Bocognano, j’y conduisis une petite enquête pieuse d’où il résulta clair comme le jour que la plaquette n’est encore qu’un poème, en prose, oui, mais un poème. Le fils du gendarme normand en prêtait aux camarades corsicains de son père.

Mais dans le train qui nous emportait, lui à Nice, moi à Menton, j’étais crédule à un martyre, que son étisie parait de vraisemblance. Je crois bien qu’il me fit voir à ses poignets l’empreinte rouge des menottes. Donc à Nice, terme commun du voyage, Glatigny voulut m’accompagner à la diligence. Elle était encore à cette époque le seul moyen de communication entre les deux villes, et c’est elle qui voiturait « à pas lents » les condamnés du fatal oracle d’Épidaure. Une place s’y trouvait libre, il y monta, ne sachant où gîter peut-être : « Je veux voir, prétexta-t-il, à La Turbie, ce fameux laurier gigantesque et cinq ou six fois séculaire dont Banville a célébré la gloire. » — « Vous me permettrez bien de vous y offrir à déjeuner, lui dis-je. La Turbie a vu naître aussi Masséna, et on boit au relai certain vin blanc produit par les vignes de ses pentes qui ne le cède que pour le prix aux plus grandes marques de Bourgogne. »

Puis il advint qu’à La Turbie, ledit vin y aidant sans doute, nous avions mis sur pied le scénario d’un drame en cinq actes, intitulé : L’Écumeur de Mer, dont Masséna était le héros. Le rôle était pour Coquelin. — Allons l’écrire ensemble, décidâmes-nous dans la fièvre de l’enthousiasme.

Il est, en collaboration, des cas, dirait Murger, où