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faire des Rothschild. D’ailleurs, vous me dites que ça vaut dix-sept mille francs. Les voilà, les valeurs ! Je n’en vois pas d’autre.

L’ombre de la pipe. — Je m’éteins.

Trouillebert (enchaîné). — Enfin est-ce de moi ?

Gérôme. — C’est possible. Mais j’ai connu un temps où tu faisais mieux que ça. Le temps du Combat de coqs. Te souviens-tu de ce temps-là, Trouille ?

Chœur des experts. — Allons bon ! il va recommencer !

Trouillebert (enchaîné). — Est-ce de moi ? Est-ce de moi ?

Gérôme. — Si tu y tiens. D’ailleurs, tu dois bien le savoir. Quand on fait de ces choses-là, on s’en souvient toute la vie. C’est comme un remords encadré. Je me rappelle que, un jour, au Caire…

Chœur des experts. — Monsieur Gérôme, nous ne vous demandons pas si le tableau est bon ou mauvais, nous vous demandons si il est de Corot.

Gérôme. — Alors c’est une autre paire de manches. Je ne fais point dans la partie. Mais, si vous voulez, je connais quelqu’un qui est très fort sur l’article. Un gentil garçon, n’ayant par lui-même aucun talent personnel, mais qui fait le Corot dans la perfection. Je dirai même qu’il les fait mieux que Corot, et sans s’en douter. Car s’il s’en doutait, il n’en ferait plus. Voulez-vous que je vous mette en rapport avec lui ?

Chœur des experts. — Entendu. Où loge-t-il ?

Gérôme. — Le voilà. (Il montre Trouillebert enchaîné.)

Chœur des experts. — Est-ce un arbitrage décent que de s’en remettre ainsi à la personne juge et partie ?