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IV

LA FONTAINE DES GABOURETS


Je n’avais pas toujours, Dieu merci, la critique d’art si grave et bonimentaire. Hors du Journal officiel et loin du regard sévère d’Ernest Daudet, il m’arrivait, pour mon dimanche, de jongler dans les feuilles gaies avec ma férule mac-mahonienne, à l’exemple de ce bâtonniste de la place des Pyramides qui avait été l’une des admirations de ma badauderie parigote. « Vous avez le Seize Mai sournois », me disait Rochefort à Genève. Et c’était vrai, je louchais sous la toge du sacerdoce à cette liberté de penser haut et de tout dire qui y dessinait déjà le chroniqueur irrévérencieux, aux pseudonymes protéens, que j’allais être. « La Fontaine des Gabourets », églogue, fut l’un de mes premiers essais d’irrévérence. Il n’était pas fait précisément pour plaire, à l’hôtel Drouot, dans le « monde où l’on vend », ni à l’Officiel du reste, et mes catalogues se ralentirent. C’était le temps des faux Corots, ou « trouilleberts », et les experts