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accoudé sur le pont, regardant couler le Rhône avec une persistance que le fracas des eaux jaunes et bouillonnantes ne suffisait pas à expliquer.

Lorsque vint le printemps et que les fenêtres de la maison du colonel s’ouvrirent en face des coteaux verts, le quai n’eût pas de flâneur plus assidu.

Et quand, musique en tête, le 17e hussards allait en promenade militaire, le cheval qui caracolait le plus brillamment était celui du lieutenant Duval.

Enfin, l’officier qui, ferme en selle et la pelisse flottante, rivait le plus ardemment son regard au balcon du colonel, c’était encore le lieutenant Duval, l’amoureux sans espoir de Marcelle.

La charmante fille ne pouvait voir toutes ces choses sans en être touchée. Elle n’y était point habituée, la beauté de Judith rejetant fatalement dans l’ombre son fin visage pâle et brun.

Cette silencieuse faconde chercher son regard, avec tant de respect et de persévérance, avait un côté poétique qui attendrissait la douce Marcelle.

L’officier modeste qui l’aimait ainsi de loin