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mot fatal de madame Myonnet : « Qui voudrait épouser à la fois un substitut pauvre, une mère infirme et une belle-sœur grincheuse ? » bourdonnait follement à ses oreilles :

N’était-ce donc pas assez de s’appeler Samson tout court, et fallait-il encore s’exposer à porter la charge écrasante de tout une famille ?

Judith se souvenait aussi du conseil d’Hortense : « Si tu crois l’aimer, épouse-le. Si ton affection ne doit pas l’emporter sur la médiocrité de la position, refuse. »

Or, si la veille encore, en songeant au respect tendre et empressé du jeune homme, à son visage intelligent, à son amour deviné, elle se sentait doucement remuée, cette sensation s’était brusquement envolée sous le souffle desséchant d’une femme jalouse.

« Il est de bonne famille », disait la sagesse.

« Il n’a pas de fortune », répondait l’ambition.

« Il est bon, sérieux, instruit », disait la raison.

« Il n’a pas de fortune », répondait l’orgueil.

« Il t’aime ! » disait le cœur.