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Le major Jouanny à madame de Guimont.
Toulouse, 29 janvier.

Vous êtes bonne, madame, et je sais, voici bien des mois déjà, que vous méritez toutes les reconnaissances, celle du cœur et celle du souvenir.

Votre lettre est le premier sourire de mon existence morne, depuis qu’un grand deuil l’a frappée. Devant la mort, les griefs tombent, les ressentiments s’envolent ; il se fait un grand apaisement. On est surtout surpris de vivre malgré la secousse, et, plus encore, d’avoir si péniblement ressenti ces grandes misères d’autrefois, qui ne sont plus que des riens quand une vraie douleur a passé.

Et pourtant, combien peu de ces misères-là m’ont été épargnées ! Les circonstances ont en quelque sorte encore assombri mon deuil. Sans respect pour la mémoire de ma chère morte, le passé s’est une fois encore dressé contre elle avec des réclamations et des duretés implacables. Les petites dettes sortaient de terre pour l’accuser.