Edmond Gaussens, lui, avait bien laissé prendre un coin de son cœur entre les doigts roses de la jeune héritière, mais il était un peu sceptique, se savait trop chétif : pour être épousé, ne voulait pas user sa jeunesse en rêves bleus et cherchait dans les coulisses des petits théâtres, où il avait ses entrées, des diversions positives à ses velléités éthérées. Il n’y cueillait que dégoût !
La réserve du trésorier, réserve visible et persistante, était généralement attribuée à son manque de fortune. On ne pouvait donc que louer sa fierté, la noblesse de ses sentiments, qui le mettaient à l’abri de tout soupçon de cupidité.
M. Gilmérin lui-même, toujours à la recherche d’un gendre modèle, s’était aperçu des respectueuses assiduités du trésorier et se disait :
— Voilà un bel officier qui trouve ma fille adorable et serait facilement féru d’amour… comme tous les autres, du reste. Ah ! je suis un heureux père !… mais, pas plus que les autres, il n’oserait songer à l’épouser. C’est là le bénéfice des fortunes connues et des positions tranchées.