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toutes sortes de publics, tour à tour gai, satirique, frondeur, tendre et élégiaque. Il a fourni au café-concert une quantité innombrable de chansons dont la forme et l’esprit tranche du tout au tout sur la note qu’on a coutume d’y entendre. Il est moderne à souhait, tout en conservant un tantinet l’empreinte bérangesque des jeunes années. Il a déjà en librairie deux volumes : la Vie en Chansons et Autour du Moulin. Ce dernier ouvrage a été publié chez Flammarion avec couverture illustrée par Grûn.

Je voudrais, si la place ne m’était mesurée, mettre sous les yeux du lecteur un échantillon de chacun des genres que sait si heureusement traiter ce fécond chansonnier ; je me bornerai pour aujourd’hui à citer :


A COCHIN


Air nouveau de Victor Leclerc, ou du Bureau de Placement.


Lorsque l’on apprit, sort fatal !
Que c’ pauvr’ Machin, un poitrinaire.
Plus malade qu’à l’ordinaire,
Venait d’entrer à l’hôpital,
Il était trois heur’s moins un quart.
Et chacun dit : « il est trop tard.
« Nous irons ensemble à Cochin
« Le voir jeudi prochain. »

Le jeudi suivant on se dit :
« On connaît Machin à la ronde,
« Il ne faut pas que trop de monde
« Se bouscule autour de son lit.
« Dans la sall’ ça f’rait du pétard ;
« D’ailleurs aujourd’hui c’est trop tard.
« Nous irons ensemble à Cochin
« Le voir dimanch’ prochain. »

Le dimanche, les grandes eaux
D’un ciel gris tombaient avec rage ;
On n’eût pas affronté l’orage
Sans être mouillé jusqu’aux os.